Du troisième au cinquième de nos périples cycladiques, sauf exception, nous ne nous sommes plus baladés sur Paros, la maison familiale de Parikia devenant une base de repli et de récupération entre des treks organisés dans les îles alentours. Avant d’en explorer de nouvelles, nous souhaitions revenir sur l’île d’Amorgos, afin de maîtriser un lieu qui nous avait grandement fait souffrir en 2009 (voir ici).
Il s’agissait de mesurer nos progrès, d’abord physiques, puisque nous avions commencé à marcher en Bretagne depuis deux mois, ensuite matériels, puisque nous nous étions procuré deux pièces d’équipements que nous espérions décisives dans la progression de notre confort de marche: de véritables chaussures de randonnées, de marque Asolo, et des chaussettes double-peau. Le changement fut en effet radical, ce combo nous ayant permis, entre autres, de régler définitivement nos problèmes d’ampoules. A ces deux pièces décisives, nous en avions adjoint d’autres moins convaincantes : un chapeau, une paire de lunettes de soleil, des chemises de rando, et surtout un système de couchage D4 premier prix, alliant tente ultralight, sac de couchage ultralight et tapis de sol. Quelques années plus tard, à l’exception du sac de couchage, que nous utilisons parfois lors nos randonnées estivales, nous avons bazardé tous ces éléments. Une autre amélioration m’était spécifique : j’avais coupé la crinière de hippie qui pourrissait mon hygiène les deux années précédentes.
C’est affublé de toutes ces nouveautés que nous débarquons à Katapola début juin. Malgré la chaleur accablante, témoignant d’un été précoce, nous avons préparé un programme copieux de trois jours de marche. Il s’agit d’abord de joindre la Chora surplombant Katapola au terme d’une boucle dans le sud de l’île, qui nous est encore inconnue ; puis de la traverser jusqu’à Egiali, dans le sens inverse de 2009 ; enfin de grimper le Chorafakia, en espérant profiter de la vue dégagée dont nous avons autrefois été privés.
Dès les premières pentes, la canicule freine nos ardeurs, et après une heure de marche, arrivés en amont de la chapelle d’Agioi Pantes, nous descendons jusqu’à la baie d’Agioi Saranta, où nous attend une baignade rafraîchissante.
De Katapola à la baie d’Agioi Saranta
Le départ de Katapola
Mon nouvel accoutrement : chapeau de paille, chemise, lunettes de soleil, chaussures Asolo
Celui d’Ivonig, avec les même chaussures Asolo doublées de chaussettes double-peau
Mon nouveau système de portage, presque décent, le sac à dos contenant sac de couchage et tente
Le sentier menant à Agioi Saranta
La chapelle d’Agioi Pantes
Alors que nous repartons, le soleil à son zénith nous écrase. Nous suons déjà à grosses gouttes lorsque nous rejoignons le sentier à l’endroit où nous l’avons quitté, sous la chapelle d’Agioi Saranta. Les températures élevées rendent très éprouvantes les deux ascensions suivantes, à tel point qu’arrivés face à l’impressionnante acropole de Kastri, et malgré le détour que cela impose, nous ne pouvons résister à l’idée de descendre nous baigner à nouveau.
Vers l’acropole de Kastri
La chapelle d’Agioi Saranta
Une portion de kalderimi que nous venons de grimper en direction de Kastri
Le vague monopati en balconage qui longe la baie de Potamos
L’acropole de Kastri
Le soleil commence à décliner lorsque nous quittons le site. Une rude montée nous amène à Vroutsi, d’où il nous faut suivre la route jusqu’à Korakles. Nous sommes en retard, mais nos affaires s’arrangent quand un couple de Grecs nous prend en stop et nous dépose à l’endroit où le tracé s’écarte de la route. Nous avançons sur un carrossable qui devient vite un beau monopati et cherchons alors un lieu adéquat pour poser notre tente. Cette première tentative de bivouac classique dans les montagnes grecques sera quasiment la dernière, puisqu’il est presque impossible d’y trouver un espace plat et herbeux ou terreux, ce que nous apprenons ce soir-là à nos dépends. La leçon retenu, nous sommes revenus, lors de nos périples cycladiques ultérieurs, à notre premier concept, le bivouac dans les chapelles, et plus encore sur leur parvis, en plein air.
Pour l’heure, nous finissons par trouver un espace vaguement approprié au milieu d’un champ, y posons notre tente et tentons tant bien que mal de récupérer nos forces.
La fin de la première journée de marche
La chapelle d’Agios Ioannis
Une femme sans âge de Vroutsi filant la laine à l’ancienne
Notre premier et unique bivouac en tente dans les montagnes cycladiques
Au petit matin, après une nuit peu reposante, nous rejoignons à jeun la Chora, où nous attend un petit-déjeuner mérité.
Vers la Chora d’Amorgos
Le sentier éclairé par le soleil levant ; au loin, la Chora
L’arrivée à la Chora
Une ruelle typique de la Chora
Nous voilà sur le lieu d’arrivée de notre précédent trek dans Amorgos ; il nous faut à présent emprunter en sens inverse notre parcours d’alors, en direction du port d’Egiali. Deux ans plus tard, nous sommes en bien meilleure forme, mieux équipés, et le parcours est plus facile dans ce sens. L’accomplir sera pourtant une épreuve, le soleil tapant plus fort encore que la veille, sur un tracé où aucune végétation ne vient momentanément nous protéger, si ce n’est lors du passage au monastère de Chozoviotissa. Il faut attendre l’arrivée au village abandonné d’Asfodilitis pour trouver de l’ombre sur le côté de la chapelle ; nous nous y reposons longuement.
La torride section entre la Chora et Asfodilitis
Vue frontale sur le monastère du Chozoviotissa
Vue latérale du monastère
La sente aride menant à Asfodilitis
Un repos salvateur au bord de la chapelle du village
Il nous faut ensuite parcourir la section maudite où nous nous étions égaré dans la nuit deux ans plus tôt (voir ici). Prise de jour et dans le bon sens, elle ne pose aucun problème particulier, même si nous repérons l’endroit ambigu où nous avons autrefois fait l’erreur fatale dont nous rions à présent. La baie d’Egiali s’ouvre bientôt devant nous; nous y arrivons éreintés par le petit millier de marches d’escalier qu’il nous a fallu dévaler.
L’arrivée à Egiali
Le monopati partant d’Asfodilitis, que nous avions raté dans l’autre sens en 2009
La chapelle d’Agios Mamas, où nous avions autrefois bivouaqué
Le panorama depuis la chapelle ; au large, l’ île déserte de Nikouria, où aiment mouiller les plaisanciers
La baie d’Egiali se découvre à nous
Nous dormons au camping, et le lendemain, entamons notre troisième jour de marche, ce qui est encore pour nous inédit. Nos corps n’y sont pas vraiment préparés ; nous le ressentons dès les premières pentes. Nos jambes ne répondent pas, et nous nous demandons comment nous parviendrons au sommet dans un tel état. Au moment où le monopati croise la route, une voiture passe ; nous faisons signe à son conducteur, qui nous embarque pour Langada, 50 mètres de dénivelés plus haut. Le déjeuner que nous y prenons est assez revigorant pour que nous retrouvions du jus. La suite de la montée est un vrai plaisir ; comme nous l’espérions en choisissant le mois de juin pour revenir à Amorgos, le temps est idéal, et au-delà du monastère d’Agios Theologos, aucun nuage ne vient cette fois gâcher les points de vue se succédant sur des falaises dressées 600 mètres au-dessus de la mer.
L’ascension du Chorafakia
Le monopati avant Langada, bordé de chênes-kermesse
Le monopati au-delà de Langada
Le sentier, se dégarnit progressivement
L’arrivée fleurie à la chapelle de Varvara
Le monastère d’Agios Theologos
Le sentier longeant les falaises au nord-est du Chorafakia
Vue sur la mer, 600 mètres plus bas
Arrivés à la chapelle de Stavros, nous obliquons vers le sommet du Chorafakia ; nous fatiguons cependant, et peu avant d’y parvenir, nous repérons sur ses pentes une zone permettant de dévaler la montagne hors-sentier sans grand risque, en direction du sentier emprunté à l’aller. Nous entamons une descente très exigeante, et après avoir rejoint, tant bien que mal, le chemin balisé, nous filons jusqu’à Langada. La fatigue du matin a depuis longtemps resurgi, et lorsque nous atteignons la place centrale du village, où le bus faisant le tour des hameaux est sur le point d’arriver, nous préférons stopper là notre effort et l’attendre avec les autres touristes plutôt que de descendre par nous-mêmes jusqu’au port.
La descente du Chorafakia
La chapelle de Stavros
Le sommet du Chorafakia ; à droite démarrent les pentes par lesquels nous souhaitons redescendre
La descente hors-sentier du Chorafakia
Ainsi s’achève une expédition moins éprouvante et plus accomplie que la première, mais qui laissera elle aussi des traces : si nos pieds sont intacts, si nos corps sont moins épuisés qu’en 2009, mon frère souffre de coups de soleil, celui couvrant son buste étant si intense que des cloques s’y sont formés ; à notre retour à Parikia, une amie de mon père présente sur place lui diagnostiquera une brûlure au second degré, qui sera à peine guérie lorsque nous embarquerons, quelques jours plus tard, à destination du second objectif du séjour : l’île de Sifnos.