Le quatrième jour du trek devait m’emmener hors balisage sur les crêtes de la Serra d’Alfabia. J’aurais achevé ma marche sur son sommet le plus oriental, Cornador Gran, où opencyclemap indique un abri dont je n’ai trouvé nulle autre mention sur le net. Le lendemain, j’aurais rejoint le GR221 dans la prairie de l’Ofre et l’aurais descendu à rebours jusqu’à Biniaraix, d’où une variante m’aurait conduit vers les gorges du Torrent de Pareis.
Après les mésaventures des jours précédents, je suis sceptique quant aux informations d’opencyclemap et opte pour un tracé bien plus modeste, qui me permettra de reposer des jambes mises à rude épreuve pendant trois jours. Il se résume à joindre et visiter Soller, à une distance d’à peine 10 kilomètres, y regarder le clasico entre le Real et le Barça puis investir une chambre d’hôtel du centre-ville. Le jour suivant, le GR221 me conduira directement à Biniaraix.
Je me soumets de bonne grâce à ce plan alternatif, explore tranquillement la vallée de Soller et sa vieille ville et assiste avec regret à une défaite du Real qui condamne définitivement les madrilènes dans la course au titre, à la grande joie des spectateurs qui m’entourent, tous fans du Barça.
La vallée de Soller
Le sentier plonge vers Port de Soller
Sur mes flancs, plusieurs corps de ferme
Port de Soller
La voie pavée s’enfonce…
…dans une vallée brumeuse
Une rue du centre-ville de Soller
Le vieux train qui relie Soller à Palma, photographié sur la place de sa Constitucio
Sur la même place, l’église de San Bartomeu, pas vraiment à mon goût
Le clocher arrière de l’église
Dix minutes après la fin du match, alors que j’attends mon tour à la réception d’un hôtel jouxtant le bar, une carte touristique attire mon attention. J’y découvre que l’abri hypothétique du sommet de Cornador Gran, où j’étais censé faire halte avant de changer mes plans, existe bel et bien ! Il me reste 3 petites heures avant la nuit ; l’abri est planté 900 mètres plus haut, à une distance de 8 kilomètres dont les 2 derniers seulement doivent s’effectuer hors balisage; en pressant le pas, je devrais pouvoir l’atteindre à temps ! Excité par une soudaine montée d’adrénaline, je quitte soudain l’hôtel m’élance à l’assaut de la montagne.
Le pic rocheux qu’il s’agit de gravir en quelques heures
Après deux kilomètres de marche forcée, je dépasse le village de Biniaraix, où je reviendrai le lendemain, et commence l’ascension proprement dite. Elle s’effectuera intégralement sur une extraordinaire voie pavée, sans nul doute la plus belle de toute la Ruta de Pedra en Sec. Dire que je l’aurais laissé de côté si je m’en étais tenu à mon programme minimaliste ! Je jubile d’avoir changé d’avis.
L’impressionnante « route de pierre sèche »
Le chemin pavé s’enfonce dans une montagne toute aussi majestueuse que lui
Je laisse derrière moi le village de Biniaraix
Quelques témoignages de la beauté d’une route de pierre sèche…
…qui me dépose sans temps mort au pied de la colline finale
Non content d’être splendide, le chemin dispose d’un revêtement impeccable qui me permet de grimper à un rythme soutenu. J’arrive une demi-heure plus tôt que prévu à son terme, près des fermes de l’Ofre, endroit où je quitte le GR221 pour une petite improvisation finale. Il me reste 200 mètres de dénivelé à avaler, sur un sentier vague et touffue que des cairns balisent correctement.
La grimpe finale de Cornador Gran
Vue sur la vallée de l’Ofre durant l’ascension
Un sommet intermédiaire où je cherche à tort l’abri quelques minutes
Dominant la vallée, le sommet rocheux de na Maria à droite et à gauche, celui, conique, de l’Ofre
Je me hisse sur la crête de la Serra d’Alfabia, dont le sommet de Cornador Gran est la pointe septentrionale
Sur les pentes du sommet, l’abri tant recherché
Je tombe avec plaisir sur une charmante cabane en pierre munie d’une table et d’une cheminée. Après avoir admiré la vue sur la Tramontane depuis le sommet et récolté du bois, je m’installe dans ce savoureux cocon en me félicitant une dernière fois de ne pas avoir passé la nuit à l’hôtel.
Le refuge de Cornador Gran
Vues extérieures
La cheminée…
…dont je fais bonne usage
Le coin cuisine
La chambre à coucher
Du sommet adjacent, vue sur la vallée de Soller…
…et la Serra d’Alfabia
Au réveil, je m’enfonce dans une purée de pois qui ne s’estompe qu’à mon retour sur le GR221. La descente du chemin pavé est aussi jubilatoire que fut son ascension la veille.
Deuxième passage sur la « route de pierre sèche »
Quelques hectomètres sur un chemin terreux…
…avec un panorama sur Soller…
…et j’enchaîne les lacets pavés…
…avec vue constante sur la vallée vers laquelle ils m’entraînent
Le chemin tortueux n’en finit pas de me régaler
Une idée du travail titanesque qu’a demandé l’édification de ses contreforts
Une petite variante finale et je déboule dans le village de Biniaraix.
Biniaraix
Vue lointaine
…mi-distance…
…et rapprochée
Vue sur Soller depuis Biniaraix
En rouge, le tracé finalement suivi entre Cap Gros et Biniaraix, avec détour par es Cornador Gran
Le GR221 aurait pu m’emmener directement au lac de Cuber par la voie pavée que je viens de prendre à contresens. J’ai décidé d’atteindre ce lac par un tracé autrement plus ambitieux, dont l’intérêt principal est de transiter par les gorges du Torrent de Pareis. C’est à Biniaraix que démarre cette variante.