Une nuit blanche, dix heures de voyage sur terre et mer, un temps couvert, pas de téléphone, des montagnes intimidantes ignorées des circuits touristiques, des locaux qui ne parlent pas un mot d’anglais, une incertitude totale quant à la viabilité ou même l’existence des sentiers improbables auxquels je me destine: autant dire que je ne m’engage pas dans les Alpes albanaises en totale confiance. Et pourtant, les deux jours de marche vers Theth ne me réservent que des bons moments.
En rouge, l’itinéraire de Lekbibaj à Theth
Le bon état des sentiers de la vallée de Lekbibaj me rassure immédiatement.
Les hameaux du coin sont d’ailleurs bien entretenus, et les chiens qui les gardent autrement mieux dressés que ceux de Bulgarie et de Macédoine.
Les fermes coquettes de Curraj i Poshtëm
A la sortie de Curraj i Poshtëm, excellente surprise: la sente vertigineuse qui s’élève sur les flancs du Maja Ruku i Nikajt est en parfait état et consciencieusement balisée, selon une norme commune à toutes les Alpes dinariques. C’est parti pour dix kilomètres de plaisir!
Clichés pris au fil du sentier
Au fil de la route, les panoramas se multiplient, de plus en plus baignés de soleil.
Premières perspectives sur les Monts maudits
Je vois défiler à ma droite une puissante barre rocheuse…
…qui dépasse allègrement les 2000 mètres
Entre elle et moi, la gorge profonde du Limi Currajve…
…dominée par un gros rocher…
…le Maja Mripës…
…derrière lequel je distingue bientôt…
…la cuvette reculée de Curraj i Epërm…
…fermée par les falaises de Drelës
La vallée est occupée par un village aux demeures dispersées et à moitié abandonnées, bien que leur façades en pierre aient fière allure.
Le village de Curraj i Epërm
Vues d’ensemble d’un habitat épars
Au centre du village, en bord de rivière, l’église Saint-Joseph, à l’abandon
D’autres maisons du village, dans un cadre enchanteur
Près d’une ferme périphérique…
…une étonnante réserve de bois tressée en osier…
…tout comme le sont de nombreuses barrières délimitant les champs
Les toilettes sèches sont un peu moins soignées
Mes cartes indiquent un café et un centre touristique complètement fictifs; quant au “camping”, c’est un simple champ.
Mes collègues de chambrées se montrent bien curieux.
Au lever, je transite dans une vallée voisine et la ravine de Qerec.
Suit une rude ascension forestière, sur une sente mangée par la végétation. De temps en temps, quelque clairière me permet d’apprécier une canopée colorée par l’automne et couronnée de pyramides calcaires.
Six cents mètres plus haut, je surgis de la forêt en surplomb de la haute vallée du Limi Currajve, que je vais longer jusqu’au cirque qui la ferme, sur un sentier en balcon de plus en plus effondré et caillasseux. Dans le final, le balisage avare m’oblige à progresser à l’instinct, dans une solitude qu’aucun être humain ne viendra troubler.
Du haut de la vallée du Limi Currajve
Sorti d’une forêt dominée par le Maji Hekurave…
…j’avance sur une pente inclinée…
…qui se referme…
…au niveau du Maja e Boshit
A l’endroit où je quitte la vallée, vue en arrière sur le Maja e Boshit…
…et la barre calcaire qui le joint…
…au Maja Gavnit…
…à droite duquel s’étend…
…la majestueuse vallée du Limi Currajve
C’en est bientôt fini de mon isolement: le tracé officiel des Peaks of the Balkans n’est plus qu’à une heure de marche.
Retour à la civilisation
Contournant le Maja Kij Zhariellave…
…je bascule dans la vallée de Theth…
…via un pierrier…
…puis un chemin conventionnel…
…qui rejoint le tracé des Peaks of the Balkans au niveau d’un pont de bois
Les trente prochains kilomètres, je suivrai consciencieusement une section iconique de l’itinéraire de marche le plus renommé des Balkans.