Dès notre quatrième voyage cycladique (raconté ici), Ivonig et moi commençons à nous lasser de notre organisation habituelle, consistant à végéter quelques jours dans la maison familiale de Paros entre deux cycles de randonnées dans les îles alentour. Cet intermède entre deux marches, autrefois agréable, voire nécessaire au vu de notre piètre condition physique, nous apparaît dorénavant comme une perte de temps. La méthode convient toutefois à notre ami Sacha, et puisqu’il était des nôtres lors du cinquième périple (évoqué ici), nous l’avons temporairement conservé. C’est à l’occasion du sixième, organisé trois mois plus tard, à la fin de l’été 2014, que nous la modifions radicalement.
La nouvelle organisation évite tout passage à Paros ; il s’agit à présent de marcher tous les jours, en transitant d’île en île au fil d’une randonnée au long cours s’étalant sur presque trois semaines, et d’ainsi traverser les Cyclades à la marche. D’autre part, nous souhaitons minimiser les passages à l’hôtel, coûteux, peu oniriques et contraignant l’emploi de notre temps, au profit du bivouac en plein air, sur les parvis des chapelles. Lors de notre première traversée des Cyclades 2014, nous dormirons à la belle étoile une petite moitié de nos nuits, procédé que nous adopterons systématiquement durant la seconde (racontée ici).
Je passe beaucoup de temps à planifier l’itinéraire de marche ; la principale difficulté consiste à gérer le passage d’une île à l’autre, les trajets maritimes étant moins fréquents à partir de la mi-septembre, et leurs horaires parfois rendus publics quelques semaines en amont seulement.
Je finis par établir un programme incluant sept îles de l’axe sud-ouest des Cyclades:
Six d’entre elles, à savoir Santorin, Folegandros, Milos, Kimolos, Kythnos et Kea, nous sont encore inconnues. Quant à la septième, Sifnos, nous l’avons déjà partiellement arpentée en 2011 (voir ici) et souhaitons explorer tous ses recoins, au fil d’une boucle de cinq jours qui devrait constituer l’apogée du voyage. Un autre moment croustillant du périple est sa première semaine, si intense qu’au soir du septième jour de marche, nous aurons visité, plus ou moins complètement, cinq îles différentes. Sa partie la plus intrigante est le final sur Kea, île située à l’écart des circuits touristiques et possédant une identité bien spécifique ; et en effet, elle ne nous décevra pas.
Nous devons porter sur notre dos tout le nécessaire pour trois jours de marche ; aussi nous faut-il alléger notre balluchon, déjà dénué de tente. Nous nous contentons donc d’un seul set de vêtements de rechange, en prévoyant une lessive tous les deux jours au savon de Marseille, et d’un unique pantalon-short, le forclaz 500, pièce d’équipement fétiche achetée pour l’occasion et que nous utilisons encore ; nous enlevons la lourde armature de nos sacs de 40 litres, que nous préférons structurer en y plaçant, pour la première fois, notre tapis de sol en cylindre ; enfin, en guise de guide, nous n’emportons qu’une douzaine de feuillets recto-verso, sur lesquels sont compilés en caractères microscopiques les indications textuelles de Raymond Verdoolaege, agrémentées de quelques bouts de cartes trouvés sur internet. Ainsi allégé, notre sac constitue le système de portage ultime constitué en utilisant uniquement du matériel premier prix de Décathlon. Nous le conserverons jusqu’à l’automne 2015, moment où nous nous déciderons enfin à investir dans un équipement technique de qualité, les dépenses conséquentes étant jusqu’alors réservées à nos chaussures.
C’est dans ces conditions que nous nous lançons, début septembre, à l’assaut de notre première île, Santorin, démarrant la plus décisive de nos marches, celle qui fera de nous de véritables randonneurs au long cours.