Voyage dans la région de Lisbonne (janvier 2016) – 1/5 – de Cascais à Peninha

Quitter son domicile le matin du nouvel an comporte des inconvénients, entre autres le fait, en l’absence de bus métropolitains, de devoir marcher 7 kilomètres dans le froid et la nuit pour atteindre la gare routière de sa ville. En compensation, le car interrégional qui m’emmène à Paris est complètement vide, à l’heure où la ville entière cuve son alcool.

Douze heures après avoir quitté mon domicile, je déambule, toujours de nuit, dans les rues de Lisbonne. Ma randonnée ne démarrant qu’au matin, je loge en ville, chez un jeune Portugais nommé Bernardo. Il a la gentillesse de m’emmener dans les endroits dont il est un habitué : un restaurant situé dans le quartier de Mouraria, où est né le fado, puis une échoppe minuscule nommée « Ginjinha Sem Rival » autour de laquelle se masse une foule bruyante. On y sert dans des petits verres en plastique une dose de ginjinha, une liqueur de cerise faite maison, que les gens dégustent en pleine rue avant de se resservir. J’en descends deux ou trois shots puis quitte mes hôtes, histoire de sommeiller quelques heures avant de m’élancer vers le parc naturel de Sintra.

L’échoppe prise en photo au retour du parc de Sintra.

Le lieu de départ de mon trek a été difficile à déterminer. Devant passer quatre journée et demi dans un parc aux dimensions somme toute réduites, je me suis décidé à partir de Cascais, afin d’augmenter le kilométrage.

La première journée de marche, au départ de Cascais

Ce n’était pas sans quelques réticences, le parcours joignant cette station balnéaire au parc de Sintra proprement dit se résumant en une route goudronnée de 10 bons kilomètres. Je n’ai pas eu à le regretter toutefois, d’abord parce que Cascais est facile à joindre depuis Lisbonne, ensuite parce que patrimoine architecturalde la ville est une bonne introduction.

La ville de Cascais

La place centrale

La mairie ; je reverrai souvent ce type de façade peinte dans les villages entourant Sintra

Villas de Cascais

La côte s’étirant vers l’est jusqu’à Lisbonne

La citadelle de Cascais

Le phare de Santa Marta

Une troisième raison justifie plus encore le choix de démarrer à Cascais : bien qu’il soit goudronné et rectiligne, le tracé qui relie la ville au parc de Sintra longe une côte constamment soumise aux assauts de la mer. Des vagues énormes s’écrasent toutes les dix secondes sur des roches déchirées, explosant parfois à une douzaine de mètres de hauteur et projetant des gouttelettes jusqu’à la route. Au spectacle visuel s’en ajoute un autre, sonore celui-là. Dès qu’on s’approche du rivage, le vrombissement mêlé de la mer et du vent est tel qu’on s’entend à peine parler. Bien qu’habitué au littoral breton et normand, jamais je n’avais vu mer si agitée. Elle n’aura toujours pas calmé ses ardeurs lorsque se dessineront à l’horizon les monts de Sintra.

La côte au-delà de Cascais

Les rouleaux déboulent…

…sur le littoral rocheux…

…et lui explosent dessus

La bouche de l’enfer, partie de la côte particulièrement découpée par les flots

Un pointe rocheuse en prend plein la tronche

Le phare de Cabo Raso, pointe sud-ouest de la côte lisboète

La plage de Cresmina, où je quitte enfin la route ; au fond, les collines du parc de Sintra

En chemin, je croise plusieurs fortifications, autrefois destinées à contrôler l’entrée dans la baie de Lisbonne. Certaines, muséifiées, permettent d’observer sur leur chemin de ronde quelques pièces d’artillerie ancestrales ; d’autres sont devenues des hôtels ; d’autres ont été tout simplement abandonnées.

Les fortifications côtières

Le fort de Sao Jorge de Oitavos

Les canons exposés dans le fort

L’ancien fort de Guincho, transformé en hôtel

Sa cour intérieure

L’abandonné Forte das Velas, dépassé un peu plus loin

Après deux grosses heures de marche, je traverse la grande plage de Guincho et atteint enfin de jolis sentiers qui serpentent dans les bosses, en surplomb de la côte. Mon plaisir dure une heure, au terme de laquelle je déboule sur une route carrossable menant au village d’Arneido. Le restant de la journée, j’aurai beau arpenter en tout sens les monts de Sintra, jamais je ne retrouverai de véritable sentier. Les chemins qui me permettront de traverser les luxuriantes forêts locales seront au mieux des pistes en terre, au pire des routes goudronnées. Leur médiocrité sera heureusement compensée par des panoramas sur la région lisboète qu’offrent les sommets de Pedra Amarela et du Tholos do Monge, le deuxième plus élevé du parc.

Dans le parc de Sintra

La grande plage de Guincho, d’où démarre l’ascension des monts de Sintra

Je longe la côte…

…rentre dans les terres, où se croisent diverses sentes…

et revient plus loin sur la côte

La piste carrossable où je débouche ; au loin, le village d’Arneido

De l’ajonc borde le chemin

Vue sur le Palais de Pena depuis le sommet de Pedra Amarela

Depuis le sommet du Tholos do Monge, la vue s’étend jusqu’à Lisbonne

Du Tholos do Monge, je rallie ce qui est, au vu de l’heure tardive, devenu l’objectif de ma journée : le sanctuaire de Peninha, une chapelle entourée d’édifices secondaires, plantée sur un piton fait d’amas rocheux aux formes polies par la pluie. Le site est splendide, de même que le panorama qu’il offre sur la région alentour ; dommage que la chapelle ne soit qu’un bloc de béton sans charme.

Le sanctuaire de Peninha

Le sanctuaire vu depuis le chemin

L’arrivée devant les premiers bâtiments du sanctuaire

La douteuse chapelle en béton édifiée sur le chaos rocheux

Vue sur Cascais depuis le sommet de Peninha

Durant quelques minutes, je pense installer mon bivouac dans la cour abritée d’une des maisons entourant la chapelle. Un agent de sécurité faisant des rondes sur le site m’en dissuade. Il me faut redescendre le piton rocheux et fureter dans les forêts alentour. A peine ai-je pénétré un premier sous-bois que je découvre un espace de terre plat et discret à quelques mètres du chemin; j’y installe mon bivouac.  

Dans la foulée, grimpe sur un rocher adjacent, qui dispose d’une belle vue sur le sanctuaire : un lieu parfait pour engouffrer ma semoule !

J’aurais aimé contempler l’endroit jusqu’à la tombée du jour ; quelques gouttes d’un crachin naissant m’en dissuadent. Elles annoncent une pluie qui arrosera toute la nuit ma tente, avec plus ou moins d’intensité. Pour mon premier bivouac solitaire à l’étranger, j’aurais préféré d’autres conditions, mais je savais à quoi m’attendre.

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