Au terme de ma traversée des Calanques, j’entendais prolonger ma marche jusqu’à la chaîne de la Sainte-Baume. La longue phase de transition qu’un tel projet implique m’en dissuade ; je découvrirai la Sainte-Baume deux ans plus tard, et préfère dans l’immédiat me rabattre sur le massif du Garlaban, le plus symbolique de la région marseillaise.
A posteriori, je ne pense pas avoir fait le meilleur choix, même si je garde un bon souvenir de cette immersion dans des collines magnifiées par les récits de Pagnol et les films d’Yves Robert qui en ont été tirés.
Le massif étant assez limité en étendue, même pour une randonnée d’une journée et demie, j’ai élaboré une trace zigzaguant dans tous ses recoins, ainsi que dans les bourgs l’encerclant.
Le parcours finalement réalisé en deux petites journées (lien openrunner)
Je démarre au sud de la montagne, à Aubagne, où un bus m’a emmené depuis Cassis en fin de matinée. Avant de m’élancer à l’assaut du Garlaban, je visite la ville natale de Pagnol, dont le centre historique, perché sur une butte mais dont il ne reste pas grand chose, est cerné d’étendues bétonnées. Rien de bien fameux !
La ville d’Aubagne
Une ancienne porte d’entrée dans la vieille ville
La tour de l’Horloge, avec son clocher en fer forgé caractéristique de la région
La chapelle des Pénitents blancs
La banlieue d’Aubagne ; au fond, le Garlaban, mon objectif du jour
Depuis le centre-ville, quelques kilomètres de marche suffisent pour rallier le pied du massif. A partir du domaine de la Font de Mai, axé autour d’une belle ferme reconvertie en écomusée, je m’enfonce dans la garrigue, sur des pistes d’abord, puis de charmants sentiers. Remontant le vallon de Passe-Temps, j’atteins bien vite la Baume du Plantier, grotte célèbre pour avoir été l’un des lieux de tournage de La Gloire de mon père, film inspiré du livre éponyme de Pagnol qui a marqué mon enfance.
Vers la Baume du Plantier
La ferme du domaine de la Font de Mai
D’autres bâtisses du domaine
Les sentiers de garrigue me menant au col d’Aubignane
La grimpe vers la Baume du Plantier
Le vallon de Passe-Temps
Marseille apparaît dans mon dos
La Baume du Plantier
Au moment où je dépasse la grotte, j’ai déjà avalé 300 bons mètres de dénivelé ; la même dose me sépare du sommet du Garlaban, une bosse arrondie surgissant du massif comme un champignon. Après un beau segment de sentier en balcon dans le vallon des Piches, j’entame l’ascension finale de ladite bosse, avec quelques randonneurs rompant mon isolement. Du sommet, la vue panoramique sur les vallées alentours permet de constater à quel point elles sont urbanisées.
Le sommet du Garlaban
Le vallon des Piches, que je traverse sur un sentier en balcon
En contrebas, la Baume de Passe-Temps
Vue rétrospective sur le vallon des Piches
Le sommet du Garlaban
La croix servant de poteau géodésique
Il me faut à présent descendre vers la commune de Roquevaire, s’étalant dans la vallée à l’est du massif. Tout en dévalant le ravin du Garlaban par le sentier des Dansaires, j’inspecte consciencieusement les alentours, à la recherche d’une grotte qui m’est indispensable pour bivouaquer à l’abri de la pluie, puisque je n’ai pas emporté de tente. Malgré quelques détours hors-sentier pour être certain de ne rater aucune cavité, j’arrive bredouille en bas du ravin.
La descente du ravin de Garlaban
La vallée de Roquevaire vers laquelle je me dirige
Le ravin de Garlaban
A droite du ravin, le sentier des Dansaires se faufile dans la garrigue
Le flanc opposé à celui par lequel je descend le ravin
Le flanc le long duquel je suis descendu
Pas de grotte pour m’accueillir… Pas grave, me dis-je ; d’ici le bourg de Roquevaire, je vais bien trouver un endroit où m’installer, un recoin rocheux dans un petit bois, une villa secondaire dont les propriétaires sont absents, un abri abandonné. L’heure de marche qui suit me fait déchanter. Dans une campagne se résumant à une succession de domaines privés soigneusement grillagés, je ne peux saisir la moindre opportunité. Le centre-ville animé de Roquevaire, où je déboule après cinq kilomètres de marche, me paraît être une source d’espoir ; à tort ! J’échoue à y trouver une solution de secours, même payante. Il n’y a pas dans la commune ni alentour un seul hôtel, un seul gîte, pas même un camping où l’on aurait pu me prêter une tente. Et aucun des habitants auprès desquels je me renseigne ne se propose de m’accueillir.
Après deux heures à errer dans la zone, je m’installe à l’écart du bourg, au bord du ruisseau de l’Huveaune, sous un pont destiné à me protéger d’une averse éventuelle. Jamais un de mes bivouacs n’a autant ressemblé à celui d’un clochard, d’autant plus que mon sac de couchage inadéquat me protège moins encore que la veille et l’avant-veille de la fraîcheur nocturne. Je regrette longuement de n’avoir pas emporté mon duvet Cumulus et me promets de ne plus jamais sous-estimer la froideur du climat printanier. Malgré tout, je parviens à dormir quelques heures, sans que personne ne me dérange ni me repère, pas même le groupe d’adolescents venu fumer quelques clopes sur le pont, juste au-dessus de mon emplacement.
Quelle merveilleuse passion….quel beau voyage!!