Errance dans le Dartmoor (août 2018) – 1/4 – de Buckfastleigh à Bellever Tor

On peut considérer mon entrée dans le Dartmoor comme un ratage complet : voyage interminable centré autour d’une fausse bonne idée, la traversée de la Manche en bateau ; arrivée nocturne et pluvieuse à Plymouth, dont je peux à peine visiter le vieux port ; quête à rallonge d’un coin discret où poser ma tente sur les rives de River Plym ; arrêt prématuré sur une pelouse alors qu’un abri me tendait les bras cent mètres plus loin ; malentendu sur le système de bus qui me fait perdre quelques heures matinales et m’oblige à en en combiner deux pour atteindre le village de départ, Buckfastleigh ; enfin premiers kilomètres de marche sur un itinéraire perfectible qui, mieux conçu, m’aurait permis d’économiser quelques kilomètres tout en passant par l’abbaye de Buckfast, dont je n’ai vu que de loin l’impressionnant clocher.

Un passage poussif à Plymouth

Le ferry qui m’emmène de Roscoff à Plymouth

Le port de Plymouth pris à la nuit tombante

Le bivouac au bord de River Plym

L’abri adjacent, où j’aurais pu m’installer bien plus rapidement

Six kilomètres d’asphalte à risque sur des routes étroites cernées de haies annulant toute visibilité et je m’immisce par grand soleil dans des forêts vallonnées qui me font bien vite oublier mes désagréments initiaux. La matinée est déjà avancée et j’ai pris du retard à l’allumage. Malgré tout, ma journée de marche sera particulièrement copieuse : 33 bornes pour 1000 mètres de dénivelé positif, à peu près le même menu que les trois suivantes.

Un départ forestier

En rouge, la première journée de marche

Les rues typiques de Buckfastleigh

Des routes de campagnes aussi dangereuses que celles d’Irlande

Un premier sentier forestier

La rivière de Dart

Je la franchis par le Holne Bridge

Plus loin, le pont de New Bridge

Passé New Bridge, je surgis de la forêt et attaque le premier des nombreux tors qui jalonneront mon parcours. Prénommé Leigh Tor, il est plus modeste que la plupart de ses confrères. Devant moi, des collines de landes dégagées, parsemées de fougères, d’ajoncs et de bruyères, que je traverse au pas de course vers Aish Tor, un second et autrement plus enchanteur sommet rocheux.

De Leigh Tor à Mel Tor

L’ascension de Leigh Tor démarre dans une forêt…

et se poursuit entre les fougères

Le chaos rocheux de Leigh Tor

Dans la foulée, je quitte la forêt…

pour une lande de bruyères

Au loin, d’autres tors

Mel Tor vu de loin…

et de près

A quelques encablures de Mel Tor surgit d’un océan d’ajoncs l’un des tors emblématiques du Dartmoor, Sharp Tor. Alors que j’y déjeune, un vieux randonneur particulièrement bien équipé vient me faire la causette ; j’apprends avec étonnement que ce sexagénaire a entrepris de rallier en quelques semaines tous les tors du Dartmoor, en dormant à la belle étoile, malgré son âge avancé. Il a presque terminé son périple, performance que je salue avec une pointe de jalousie.

Sharp Tor

Sharp Tor vu de Mel Tor…

et du côté opposé

L’approche de Sharp Tor

Au sommet

Du sommet, vue vers Yar Tor…

et la vallée où je vais poursuivre ma route

L’homme à qui j’aimerai ressembler dans trente ans

Mon aîné file vers Yar Tor ; je pourrai lui emboîter le pas mais préfère entreprendre un long détour vers le sud et la haute colline de Ryder’s Hill, en espérant disposer de son sommet d’un panorama sur le Dartmoor méridional, que j’ai dû laisser de côté par manque de temps. Ryder’s Hill s’avère trop aplatie pour répondre à mes attentes ; je savoure tout de même l’exploration de ses étendues herbeuses complètement dépouillées, au cœur desquelles j’affronte mes premières tourbes. En naviguant dans ces hautes herbes, je prends définitivement conscience que les sentiers du Dartmoor tracés sur opencyclemap ne sont qu’indicatifs et, quand ils existent, dénués du moindre balisage ; il me faudra en permanence naviguer à vue, et souvent hors-sentier.

Détour par Ryder’s Hill

Je m’éloigne de Sharp Tor…

m’extirpe d’une vallée gorgée d’eau…

traverse la rivière de West Dart près du hameau de Dartmeet…

serpente dans une forêt mystique…

puis dans les fougères…

à destination de Combestone Tor…

au-delà duquel la lande s’appauvrit

Le plateau herbeux de Ryder’s Hill

Le poteau symbolisant son point culminant

De retour en vallée, j’hésite à planter ma tente sur les rives de West Dart, mais d’autres campeurs ont déjà investi cet agréable site de bivouac. Me voilà condamné à poursuivre l’effort jusqu’à Laughter Tor, sommet fleuri où je croise un couple contemplatif qui me fait découvrir, dans le muret en ruine d’un champ adjacent, un calvaire granitique reconverti en pierre de soutien.

Vers Laughter Tor

Passage dans une forêt qui semble surgir d’un conte celtique

Le gué de la rivière de West Dart, près duquel j’hésite à camper

Un peu plus loin, Huccaby Tor

Un menhir isolé…

près de Laughter Tor

Une croix chrétienne, ramenée au rôle plus prosaïque de renfort mural

Je ne trouve pas de coins herbeux propice au bivouac et préfère poursuivre ma route jusqu’à Bellever Tor, l’affleurement granitique suivant, qui surgit fièrement d’une colline dominant toute la région. Idée judicieuse : les deux principaux chaos rocheux du tor protègent du vent une pelouse centrale qui semble faite pour l’accueil des campeurs.

Bivouac à Bellever Tor

L’approche du tor

Son sommet

Un bivouac idyllique

Je m’endors insouciant, ne pressentant pas une seconde la dégradation imminente des conditions climatiques.