A peine revenu des Bauges, le trio que je forme avec Ivonig et Sacha fonce dans les Baronnies provençales, région aux paysages moins montagnards, plus méditerranéens mais tout aussi magnifiés par les couleurs automnales.
Du fait de sa situation bâtarde, entre les Alpes et le Midi, le massif des Baronnies provençales voit s’épanouir une flore très diverse ; aux versants nord de ses montagnes, couverts de forêts de feuillus, s’oppose la garrigue des versants sud, ces deux biotopes s’emmêlant parfois dans une réjouissante anarchie. Les cordons calcaires marqués qui structurent le massif, peu élevés mais très étirés, enserrent des vallées étroites et allongées où la lavande est reine.
J’ai façonné un itinéraire dans la partie orientale du parc, où il est possible de progresser sur l’arête des montagnes pendant des dizaines de kilomètres. La variété des paysages traversés et le bivouac idéal du troisième jour rendront le trek mémorable, Sacha le préférant même à celui entrepris précédemment dans les Bauges ; Ivonig et moi n’iront pas jusque-là.
Le parcours complet, totalisant 70 bons kilomètres avalés en deux journées et deux demi-journées (lien openrunner)
Les deux premiers jours, nous suivons, de bout en bout et avec quelques digressions, la ligne de crête de la montagne de Chabre, longue de presque 20 kilomètres.
En rouge, l’itinéraire emprunté durant ces deux jours
L’entrée en matière du trek est un peu poussive : huit kilomètres de voies carrossables, entre Lachau, village de départ, et le col Saint-Jean, par lequel nous attaquons l’arête de la montagne de Chabre.
Un démarrage poussif
Près de Lachau, les pentes boisées de la montagne d’Ozeron
Le village de Ballons, près duquel démarre la grimpe
Sacha et Ivonig dans ses lacets carrossables
Au loin derrière nous, les montagnes par lesquelles nous reviendrons à Lachau le quatrième jour…
…et devant nous, la montagne de Garre et le col de Muze, voisin de celui de Saint-Jean
Au col, nous bifurquons plein est et nous hissons en douceur sur la crête. S’ensuit une séquence aérienne d’une grosse heure, que nous concluons en basculant dans une cuvette tassée entre la montagne de Chabre et deux pics rocheux s’en étant échappés, les rochers de l’Adrech et de Bouzon ; nous bivouaquons au creux de ce vallon improbable, dans le préau d’un bâtiment touristique abandonné pour l’hiver.
Première vadrouille sur la crête de Chabre
Le faux-plat forestier qui nous mène sur l’arête
La crête où nous déboulons…
…s’étire vers l’est sur plus de quinze kilomètres
Au nord, les rochers détachés d’Adrech et de Bouzon, notre objectif du soir
L’arête, obstruée par la végétation…
…nous contraint parfois à louvoyer sur ses flancs
En contrebas, au pied d’une repli calcaire, le village de Sainte-Colombe
A l’approche des rochers de l’Adrech…
…nous repiquons dans les bois…
…vers un replat où passer la nuit
Au réveil, nous descendons au village d’Orpierre, moins attirés par sa conformation pittoresque que par la perspective d’un petit-déjeuner complet. Nos attentes ne sont qu’à moitié comblées : le seul commerce ouvert est un petit bistrot qui ne sert que le café.
Orpierre
Des hauteurs du rocher de Saint-Michel…
…panorama matinal sur un village…
…cerné de parois qu’apprécient les escaladeurs du coin…
…et dont la plus escarpée est le rocher de Quiquillon
L’église
Une ruelle
Une placette
Toujours affamés, nous retournons par le col de Saint-Ange sur la crête de Chabre, où un déjeuner frugal peine à compenser notre quête inassouvie.
De retour sur la crête
La voie du retour passe par le ravin de Bagnols
Vue d’ensemble dudit ravin
Les panneaux indicateurs très stylés du col de Saint-Ange
Nous laissons en arrière le rocher de Bouzon, à gauche, et celui de Saint-Michel, à droite…
…et nous engageons sur une arête à a silhouette nettement dessinée
A sa gauche, sur la ligne d’horizon, le massif des Ecrins…
…et plus près de,nous, une plaine calcaire cabossée
Sacha en pleine digestion
Le soleil est à son zénith quand nous reprenons la route, le long d’une crête parfois coupée à la serpe, parfois fracassée, parfois rocailleuse, parfois touffue mais jamais reposante. Pendant deux heures, nous avançons à un rythme d’escargot, en luttant dans les fourrés, en sautant de roc en roc, en usant des mains, en contournant des parois trop abruptes, en perdant parfois entre deux bosquets une trace peu évidente.
Seconde séquence sur la crête de Chabre
Peu après la reprise…
…nous longeons par son versant sud une portion verticale de l’arête
De retour sur une crête…
…aux saillies marquées
Perspective sur le chemin parcouru
Un passage dans les buissons…
…et un autre sur un cordon rocheux…
…où j’étale ma classe naturelle
Dans sa partie finale, la crête se clairsème lentement et devient plus praticable, à mesure que son versant nord se transforme en une impressionnante paroi verticale.
Derniers kilomètres sur la montagne de Chabre
Nous avançons sur une crête de plus en plus escarpée..
Au loin, une véritable falaise…
…que nous approchons…
…avec une certaine appréhension
De sa pointe orientale, vue sud-ouest sur la montagne de Chabre…
…ouest sur la vallée d’Orpierre…
…sud-est sur la vallée de la Durance, se resserrant au niveau de Sisteron…
…et sud sur les gorges de la Méouge, notre prochain objectif
J’ai prévu de camper sur une aire de repos des gorges de la Méouge, vers lesquelles nous devons repiquer dès que possible, la nuit s’annonçant. Nous trouvons une ouverture dans les pentes clairsemées du serre de Piloubeau ; divers chemins nous permettent de dégringoler jusqu’au hameau de Pomet, derrière lequel apparaît le cours encaissé de la Méouge. De hautes falaises calcaires surgissant d’un méandre de la rivière y forment une sorte de promontoire arrondi, le Banc du Bouc ; au sommet de cette presqu’île perchée, nous trouvons un coin d’herbe suffisamment spacieux pour dresser deux tentes. L’aire de repos est encore distante ; mieux vaut s’arrêter là !
Le bivouac dans les gorges de la Méouge
Le hameau du Pomet vu des hauteurs…
…et des gorges
Lesdites gorges
Au milieu à droite, le promontoire du Banc du Bouc
Nous y dressons un bivouac sauvage…
…malheureusement visible du hameau du Pomet
Ainsi s’achève une journée marche plus fournie en kilomètres qu’en dénivelé ; il en ira tout autrement le lendemain.