[vingtième trek de l’Europe en 25 treks]
Des 50 000 kilomètres du littoral méditerranéen, les 100 inclus dans le territoire monténégrin comptent parmi les plus épiques. Tout du long, la côte s’y dresse en une chaîne calcaire plafonnant au-delà des 1000 mètres. Sa partie la plus découpée, les célèbres bouches de Kotor, regroupent quatre golfes connectés et cernés de parois vertigineuses.
Depuis quinze ans, un trek (lâchement) balisé, la Primorska Planinarska Transverzala, ou Transversale adriatique, permet de parcourir par la montagne l’intégralité du littoral monténégrin, du port méridional de Bar, près de la frontière albanaise, à celui d’Herceg Novi, à quelques kilomètres de la Croatie. On trouve sans mal sa trace GPS sur internet, et le fonds de carte hors-ligne que j’utilise principalement, celui de mapy.cz , le mentionne également. Y a été consacré un guide anglophone exceptionnel, véritable mine d’information sur le kilométrage, le dénivelé et les difficultés techniques du parcours, les problèmes de balisage ou de transport vers tel ou tel point d’accès, les hôtels, abris ou sites de bivouac disponibles, les points de ravitaillement en nourriture et surtout en eau, dans un massif calcaire désertique en manquant cruellement.
Le guide découpe le trek en dix sections équilibrées. Je l’aurai suivi fidèlement sans une météo orageuse qui m’aura contraint à quelques sacrifices, notamment le shuntage des deux premières et deux dernières étapes et l’abandon d’allers-retours vers plusieurs sommets majeurs pris dans les nuages. Autre divergence, cette fois volontaire et méliorative: alors que l’itinéraire ne quitte jamais les hauteurs, j’ai ajouté un détour enchanteur vers les rives méditerranéennes et la ville fortifiée de Kotor.
Au total, j’en ai eu pour une semaine pleine de marche, moins éprouvante par sa charge (à peine 25 kilomètres et 1000 mètres de dénivelé quotidien) que par le terrain affronté: revêtement accidenté et caillouteux, climat détestable des premiers jours, pénurie en eau et difficultés constantes d’orientation, les seules que j’ai eu a gérer en deux mois de marche dans les Balkans.
Mes sept jours sur la côte monténégrine (lien openrunner)
Ce trek exceptionnel justifie bien quelques efforts, et je m’en rends compte dès mon arrivée à Bar.
Bar
Coincé entre le massif de Rumija…
…une côte accidentée…
…et des oliveraies plus que millénaires…
…le port moderne de Bar, le plus gros du pays…
…et à l’écart, le village à peine moins laid de Stari Bar
Bar allie à la tristesse asphaltée des stations balnéaires ce délabrement poisseux qui fait la marque de fabrique des Balkans.
Une rue balkanique typique: béton craquelé, poteaux électriques branlants, sol jonché d’ordures
Difficile d’imaginer qu’un tel cloaque abrite un trésor architectural: l’impressionnante citadelle fortifiée de Stari Bar, si peu visitée en pleine hystérie sanitaire que personne ne se préoccupe de faire payer les entrants.
Vue d’ensemble de la forteresse de Stari Bar
Perspectives diverses depuis le sud-ouest
Gros plan sur un des bastions intégrés dans l’enceinte
A l’est, la muraille tutoie un gouffre profond…
…qu’on apprécie mieux du rempart
Au nord s’échappe de la muraille un magnifique aqueduc…
…qui ramenait autrefois l’eau du mont Rumija
A l’intérieur des murs, on découvre une ville en ruine puissamment évocatrice.
Balade dans les ruines de Stari Bar
Quelques édifices tiennent encore debout, parmi lesquels des chapelles et l’ancien donjon.
Bâtisses de la forteresse de Stari Bar
La tour de l’horloge
Le palais épiscopal
L’église Saint-Venera
Derrière l’église Saint-Jean…
…le donjon, vu de l’extérieur…
…et de l’intérieur
Autour de la forteresse, les édifices musulmans dominent, ici la mosquée Omerbašića…
…là la superbe mosquée Škanjevića et son minaret en pierre…
…et plus bas, autrement plus triste, la Grande mosquée, récemment construite avec des capitaux turcs
Depuis la vieille-ville, le trek officiel s’enfonce dans la montagne, pour un détour oriental au mont Rumija avant de se réorienter vers l’ouest. Sous la menace d’un orage qui sévira tout l’après-midi, je préfère m’en retourner au port et passer la nuit au chaud à moindre frais.
Un rapport qualité/prix imbattable en Europe: une chambre plaisante avec cuisine pour même pas 10 euros!
C’est par un raccourci bien senti que je rallierai, au petit matin, la Transversale adriatique.