Je marchais depuis quatre bonnes années dans les Cyclades et en Bretagne lorsque j’eus l’occasion de tester un nouveau terrain de marche, la haute montagne. Mon ami Taleb me propose en effet de participer au séjour estival qu’il entreprend chaque année avec sa bande dans la station des Arcs. Leur voyage dure d’une à deux semaines selon les disponibilités des membres du groupe, et ils ont l’habitude de consacrer, entre deux soirées festives, quelques jours à randonner, principalement dans le parc de la Vanoise. Je les accompagne bien volontiers une petite semaine.

La bande de Taleb s’apprêtant à jouer au « bras-limite » dans le studio des Arcs 1800 qu’elle a coutume de louer ; de gauche à droite, Tariq, Kevin, Taleb et Mickaël

Le lendemain de notre arrivée, nous nous décrassons les jambes avec l’ascension sèche, depuis le col du Petit-Saint-Bernard, du sommet de Lancebranlette, d’où la vue sur le Mont Blanc est imprenable. J’ai un peu d’appréhension avant d’aborder la grimpe d’un pic s’élevant à presque 3000 mètres, moi qui n’ai jamais dépassé les 1000 mètres en Grèce, mais elle se déroule sans accroc.

L’ascension de Lancebranlette

Les pentes de Lancebranlette, vues depuis le col du Petit-Saint-Bernard

Vue vers le parc de la Vanoise depuis le sommet de Lancebranlette

A l’est, les Alpes italiennes

Le Mont Blanc, malheureusement voilé par des nuages

Épaté par cette mise en jambe, je ne résiste pas à l’idée de retourner marcher dès le lendemain. Mes collègues ont d’autres projets, c’est donc seul que j’entreprends une boucle autour du pic de l’Aiguille Grive surplombant la station des Arcs 1800. L’ascension s’effectue sur un versant aménagé pour les skieurs, mais un kilomètre après avoir franchi le col du Grand Renard, j’atteins un terrain bien plus préservé, avec une vue splendide sur l’Aiguille Rousse. Le plaisir dure jusqu’au-delà du col d’Entreporte.

La boucle autour de l’Aiguille Grive

Un passage forestier durant l’ascension

Vue sur le sommet de Bellecôte depuis les pentes de l’Aiguille Grive

L’Aiguille Rousse

Le sentier effacé qui m’emmène à l’Aiguille Rousse

L’arrivée à l’Aiguille Rousse ; au milieu à droite, le col d’Entreporte

Le passage du col d’Entreporte

Un replat dans la descente qui suit le col

Les pentes de Plan Bois surplombant les Arcs 1800

Une petite nuit et nous partons pour le gros morceau du séjour ; une randonnée de deux jours sur les contreforts du Mont Blanc, durant laquelle nous graviterons le plus clair de notre temps autour des 2500 mètres d’altitude. Nous passerons la nuit dans le refuge Robert Blanc, une première pour moi.

Tracé de nos deux jours de marche (lien openrunner)

Direction les Chapieux, hameau où nous garons notre voiture ; un minibus nous transporte au chalet-refuge des Mottets, d’où nous entamons, sur une portion de la GR faisant le tour du Mont Blanc, une ascension de 700 mètres vers le col de la Seigne.

Vers le col de la Seigne

Le minibus qui nous emmène au chalet-refuge des Mottets

Les Grandes Aiguilles vues depuis le minibus

Notre bande au cours de l’ascension

Au col, nous quittons le TMB pour une variante plus ardue. Dès les premières minutes, il nous faut désescalader une falaise en nous aidant d’une corde, dans ce qui s’apparente presque à de l’alpinisme. L’année précédente, ce passage vertigineux avait refroidi Mickaël, obligeant la bande a rebrousser chemin ; cette fois, tout le monde passe sans encombre.

La désescalade

La falaise que nous désescaladons

Tariq agrippé à la corde de sécurité

La falaise vue d’en bas

Suit un long trajet en balconnage vers le refuge, compliqué d’abord  par les quelques névés qui se se sont maintenus du fait d’un hiver tardif, ensuite par la traversée de plusieurs pierriers ; dans l’un d’entre eux, la semelle de la chaussure droite de Kevin se détache, pourrissant malgré le rafistolage de fortune de Tariq la fin de sa journée de marche. Autre contrariété : la neige abondante dissimule parfois le sentier et nous emmène à commettre une erreur de trajectoire. Lorsque nous comprenons que nous sommes en contrebas du véritable sentier, nous nous trouvons contraint d’y grimper à travers un pierrier chaotique; un passage très physique, qui nous fait d’autant plus savourer l’arrivée au refuge, où nous attend Mickaël, arrivé par une voie moins périlleuse.

Le sentier en balcon vers le refuge Robert Blanc

Un passage paisible du sentier en balcon

Un autre moins agréable ; repérez la détresse dans l’œil de Taleb

Les névés qui ralentissent notre route s’effondrent parfois sous nos pas

Nous en traversons certains à l’aide d’une corde…

…dans des passages où il ne faut pas déraper !

Vue sur la vallée d’où nous sommes partis

Le mont Tondu ; en contrebas, le piton lisse de la Grande Ecaille ; sur sa pente droite, le col que nous devons franchir le lendemain

La bande en train de remonter le pierrier pour rejoindre le sentier ; Tariq est redescendu aider Kevin

Le lendemain matin, une grosse marche nous attend ; vu l’état de sa chaussure droite, Kevin juge l’entreprise imprudente, et préfère redescendre directement dans la vallée avec Mickaël. Nous les accompagnons tous deux le temps de descendre la Combe Noire, et lorsque notre sentier bifurque, nous leur donnons rendez-vous à la voiture.

La séparation du groupe

La chaussure fautive, vainement cerclée de cordes

Son propriétaire dépité

Le refuge Robert Blanc que nous quittons

La Combe Noire que nous avons descendu, vue du croisement où nous quittons Kevin et Mickaël

Nous démarrons sans transition l’ascension de l’Aiguille de Bellaval, sur un  raidillon particulièrement corsé. Passé le col, la descente est plus abrupte encore et s’opère sur un revêtement de sable volcanique où l’accroche est faible ; un endroit très casse-gueule. S’ensuit une longue section en balcon dans des paysages enneigés, où il est parfois difficile de repérer le sentier ; au milieu, le franchissement de la Tête des Tufs. Nous achevons ce passage par une grimpe jusqu’à la Tête Nord des Fours, sommet de la randonnée, où une vue  panoramique sur les massifs alentours récompense notre effort. Le chemin de crête bien balisé qui y démarre rejoint le GR5, et peu après, le refuge de la Croix du Bonhomme. Après une pause goûter et une longue descente à travers des pâturages, et nous achevons notre circuit aux Chapieux, où nous attendent nos deux compères.

La longue section de marche sur les pentes de la Tête Nord des Fours

En haut à droite, la Grande Ecaille ; dans l’angle de la photo, le col que nous visons

Moi-même au col ; derrière, la descente la plus abrupte que j’ai jamais emprunté

Tariq crée des escaliers dans les névés trop pentus

Une vue en arrière sur notre parcours

Le paysage observable en permanence sur notre gauche

Panorama sur notre tracé depuis la Tête Nord des Fours

Le chemin de crête qui nous mène vers le refuge de la Croix du Bonhomme

Ledit refuge 

Un vieux pont près des chalets de la Raja

J’achève ces quelques jours de marche par une longue nuit d’ivresse ; c’est sans une seconde de sommeil que j’échoue au petit matin dans le train qui me ramène à Rennes, où je dois le soir même reprendre mon travail. Ce premier contact avec la haute montagne m’a bien plu; c’est avec plaisir que je retournerai avec Taleb dans les Alpes deux ans plus tard (voir ici).