Parmi les randonnées bretonnes accomplies avec mon frère Ivonig durant notre prolifique année 2016, dont je fais ici le bilan général, quatre se distinguent par leur longueur comme par leur dimension symbolique : le tour de Belle-Île-en-Mer, la traversée de la Cornouaille, le tour de la presqu’île de Crozon et la marche vers Ouessant.
Les quatre randonnées les plus marquantes de 2016
Le trek réalisé à Belle-Ile-en-Mer comporte quelques éléments originaux. Nous l’avons accompli en plein hiver, dans le sens inhabituel des aiguilles d’une montre et en complète autonomie. Contrairement aux fois précédentes, nous avons effectué le tour intégral de l’île, sans shunter un kilomètre du circuit balisé. Enfin, et c’est le fait le plus notable, nous ne l’avons pas achevé en quatre jours, comme le veut la tradition, mais en trois, ce qui durcit considérablement l’effort quotidien.
Seul élément adoucissant le challenge : avant de nous élancer de Palais, nous avons dormi chez des amis de nos parents, les Paulic, qui nous ont reçu comme des rois. Grâce à eux, c’est bien reposé et le ventre plein que nous avons pu partir à l’assaut du sentier des douaniers.
En choisissant le début du mois de février, nous craignions de ne pas pouvoir achever la boucle en trois jours, du fait des intempéries et du temps de jour réduit. Et en effet, la première journée, durant laquelle nous avons marché une quarantaine de kilomètres de Palais à Herlin sur un sentier casse-patte, fut difficile à digérer, surtout que nous avons essuyé une terrible averse de grêle au niveau de la pointe du Skeul. Malgré cela, nous avons conclu le trek sans problème, mon frère se déchaînant même dans la section finale, entre Sauzon et le Palais, pourtant la plus exigeante de l’île. Sous son impulsion, nous avons avalé en 2h40 les 13 kilomètres de montées et descentes qu’elle comporte.
Si nous retournons un jour sur cette île bénite, ce sera pour tenter d’en faire le tour en deux jours, dans de meilleures conditions cependant, probablement au mois de juin.
Le tour de Belle-Ile-en-Mer
Le tracé (lien openrunner)
La maison des Paulic, où nous passons la nuit liminaire
Notre premier bivouac, au fond de la plage d’Herlin
Le second, dans l’anse de Ster Vraz
La pointe des Poulains
La crique de Port Quinénec ; dans les hauteurs, le VVF où nous allions durant l’enfance
Nous n’avons quasiment aucune photo de notre deuxième randonnée majeure de l’année, qui nous a mené d’Audierne à Pont-l’Abbé, au terme d’un vaste détour au cœur de la Cornouaille. Et pourtant, nous considérons tous les deux ce trek comme le plus beau que nous ayons jamais effectué en Bretagne.
En 4 grosses journées et cent 150 bornes de marche, nous avons eu droit à un concentré de ce qui fait l’identité bretonne: lande affleurant un peu partout, côte douce au sud du cap Sizun, falaises accidentées au nord, port de pêche typique de Douarnenez, ruines romaines à sa sortie, bourg en vieille pierre de Locronan, bois mystérieux avant et après ce village, pays intérieur très vallonné et parsemé de chapelles de la Cornouaille, centre-ville médiéval de Quimper, rives de l’Odet typiques des rias armoricaines, avec leur écosystème mi-terrestre, mi-maritime, enfin final à Pont-l’Abbé, capitale du pays bigouden, avec son pont couvert.
Parmi tous les sites traversés, deux nous ont particulièrement frappé l’esprit : d’une part, la section très escarpée sur la côte nord de Cap-Sizun, entre Trouérennec et Douarnenez, probablement le passage le plus physique du GR34 : presque 35 bornes de murs particulièrement casse-pattes, sans la moindre trace de vie humaine. L’autre section marquante, c’est la traversée du bois du Duc, à la sortie de Locronan, par un sentier non balisé et pourtant exceptionnel. Les feuillus de cette forêt dense et verte pastel sont couverts d’une épaisse couche de mousse qui nous fait basculer dans un conte de Tolkien. Même à Brocéliande, on ne croise pas d’endroit si enchanteur ; il n’y a que la forêt de Huelgoat qui tienne en Bretagne la comparaison.
Sur le plan technique, comme une sorte de test, nous repoussons nos limites hygiéniques en ne nous lavant pas et en portant les mêmes vêtements du début à la fin du trek. Ce n’est qu’à son terme, à Pont-l’Abbé que nous nous ferons une toilette sommaire avant d’enfiler notre tenue de rechange. Nous avons ainsi pu constater que ce n’est qu’au quatrième jour que la saleté accumulée devient insupportable.
Quelques rares photos de notre traversée de la Cornouaille
Le tracé réalisé (lien openrunner)
La chapelle de Langroas, site de notre premier bivouac
La place centrale du village de Locronan
La chapelle Notre-Dame de Bonne Nouvelle, à Locronan
Le tour de la presqu’ile de Crozon, troisième trek majeur de 2016, trône en tête de notre hiérarchie sur le plan symbolique, puisqu’en joignant Hanvec à Douarnenez, il nous a permis d’achever notre tour de la Bretagne, après cinq ans et demi d’effort. Avec plus de 160 kilomètres, c’est également notre plus longue marche armoricaine. Nous l’avons réalisée en quatre jours et demi, avec une première journée de presque 50 kilomètres, durant laquelle Ivonig a contracté des ampoules, une première depuis notre trek à Naxos six ans plus tôt (narré ici). Cela ne l’a pas empêché de marcher 35 bornes en moyenne les jours suivants, le quatrième étant pour lui particulièrement éprouvant.
Du tour de la presqu’ile, qui nous a légèrement déçu au vu des louanges qu’en rapportaient ceux qui l’avaient déjà effectué, nous retenons bien sûr en premier lieu la boucle vers le Cap de la Chèvre, incontestablement l’un des sites bretons les plus emblématiques.
Le tour de la presqu’île de Crozon
Le tracé réalisé (lien openrunner)
La pointe de Pen Hir vue depuis la pointe de la Tavelle
La même pointe vue depuis la pointe de Dinan
L’anse de Dinan
La pointe de Dinan et la plage de la Palue vue du Cap de la Chèvre
La pointe de Saint-Hernot
Une mer de bruyère nous accompagne vers Morgat
A la sortie de la presqu’île, plutôt que de descendre immédiatement en direction de Douarnenez, nous faisons un long détour vers le Ménez Hom, une colline de landes surgissant au milieu de nulle part, dans le prolongement des monts d’Arrée. Sur notre route, nous croisons, sans l’avoir planifié, une chapelle peu connue dédiée à Saint Côme. Nous la considérons comme la plus belle de toute la Bretagne. Avant de grimper le Ménez Hom, nous gravissons hors-sentier le sommet secondaire de Hielc’h, une expérience que nous déconseillons aux lecteurs. Du Menez Hom, on profite d’une vue exceptionnelle sur l’intégralité de la presqu’ile de Crozon, mais aussi sur l’intérieur du pays, notamment les boucles de l’Aulne.
Le détour final par le Menez Hom
La chapelle Saint Côme
Le dolmen de Ménez-Lié
Les landes du Ménez Hom
Du Menez Hom, nous repiquons vers la côte, où nous bivouaquons une dernière fois avant de rejoindre Douarnenez. Nos derniers kilomètres sont étrangement tristes. Peut-être ressentons nous qu’en achevant notre tour de Bretagne, nous clôturons une aventure qui accapare nos esprits depuis quatre ans. Cette quête de longue haleine donnait une saveur particulière à nos marches armoricaines, que nous n’avons pas pu depuis retrouver.
L’endroit précis où s’achève notre tour de Bretagne ; en arrière-plan, Douarnenez
Et en effet, les randonnées qui suivent notre trek à Crozon ne produisent plus la même exaltation. Ainsi en est-il de notre marche vers Ouessant ; et pourtant, cette randonnée aura pour nous une aura particulière, en ce sens qu’elle conclut notre tour des quatre îles les plus emblématiques de la Bretagne : Belle-Ile-en-Mer, Groix, Bréhat et donc Ouessant, qui est en même temps la pointe occidentale de notre province.
Le tracé réalisé (liens openrunner 1 et 2)
Une première partie du trek nous mène de Brest au port du Conquet, où nous bivouaquons avant d’embarquer pour Ouessant au matin du troisième jour. L’apogée de cette séquence est la visite de la pointe Saint-Mathieu et ses édifices hétérogènes.
La pointe Saint-Mathieu
L’arrivée à la pointe Saint-Mathieu
Les divers édifices de la pointe Saint-Mathieu : de gauche à droite, le sémaphore, les ruines de l’abbaye, le phare et la chapelle
L’entrée principale de la chapelle
Ivonig se dirigeant vers le phare
Dans un second temps, nous faisons le tour de Ouessant. L’île étant très plate, il nous prend bien moins de temps que prévu ; au quatrième jour, nous atteignons le port où s’achève notre trek plusieurs heures avant le passage quotidien du bateau. Final ennuyeux d’une randonnée dont le seul moment véritablement épique est le passage au nord-ouest de l’île, dont nous n’oublierons pas le chaos rocheux complètement surréaliste.
La pointe nord-ouest de Ouessant
Le chaos rocheux démarre vers Kernévez
Le chaos rocheux de la côte et le phare de Créac’h vu depuis l’est
Le même site vu de la pointe de Pern
La pointe de Pern
Les étranges roches de la pointe de Pern
Même si notre ferveur s’étiole, nous n’en avons pas fini avec les marche d’ampleur en Bretagne : quelques mois plus tard, nous nous lancerons ainsi dans un trek de quatre jours, toujours dans le Finistère, cette fois à destination des enclos paroissiaux des Monts d’Arrée (voir ici).