J’aurais du arpenter la côte Jurassique du Devon sur plus de 50 kilomètres ; du fait de ma bévue au matin du troisième jour, j’en parcourrai 20 de moins.
En rouge et bleu, mes deux demi-journées de marche sur le littoral du Devon
De Lyme Regis à Axmouth, le sentier traverse un paysage typique du Devon nommé l’undercliff. Ce terme désigne une zone intermédiaire coincée entre les hautes falaises et la mer, apparue suite à l’effondrement partiel de la paroi calcaire et ou s’est développée une flore dense et marécageuse. Un site étrange mais pas si agréable à arpenter. J’y progresse au ralenti, sur un revêtement boueux accidenté et très glissant, au cœur d’un sous-bois sombre où le soleil perce difficilement. Je n’aperçois la mer à ma gauche ou les falaises à ma droite que lors de rares traversées de clairières. Le reste du temps, la vue est obstruée par la végétation.
The Axmouth to Lyme Regis Undercliffs
Le chemin de sous-bois casse-gueule que j’arpente pendant dix bornes
De temps en temps, une vue sur les falaises…
…ou le littoral
Passés Axmouth et le port de Seaton, le sentier continue à se faufiler entre deux niveaux d’une falaise calcaire plus déchirée que jamais. Les vues étant plus dégagées qu’auparavant, c’est une section particulièrement photogénique que j’arpente jusqu’à la plage de Branscombe. Au-delà,j’ai affaire à une falaise plus conventionnelle ; au blanc calcaire de ses parois succède progressivement un ocre rougeoyant.
Les falaises au-delà de Seaton
Le sentier va s’engager entre les deux niveaux de la falaise
Il louvoie dans un couloir de verdure accidenté…
…puis descend au niveau de la mer
La plage de Branscombe
La suite moins excentrique du littoral du Devon
Après quelques vains détours dans des champs au sol cabossé où je renonce à bivouaquer, je décide d’insister jusqu’à trouver un endroit vraiment accueillant. Un autre randonneur n’a pas eu ma patience et s’est posé à l’arrachée sur un tapis d’orties. Il aurait du comme moi persévérer : après deux ou trois kilomètres de recherche dans les sous-bois, je déboule dans une zone idéale: une vaste prairie dominant la mer de 100 bons mètres. J’y pose ma tente en bord de falaise et dîne avec une vue imprenable sur la côte Jurassique.
Le quatrième bivouac, pris au coucher et au lever du soleil
Au réveil, je constate l’impossibilité de joindre Exmouth avant le dernier bus pour Exeter. Un autre bus part de Sidmouth, station balnéaire située à une dizaine de bornes de mon site de bivouac ; je me résous à y conclure le périple. Ayant tout mon temps, je profite tranquillement des derniers kilomètres sur une côte aussi bien conservée que celles m’ayant emmené à Charmouth.
Le final sur la côte du Devon
Le segment de marche final ; au centre de la photo, on aperçoit Sidmouth
Du haut des falaises, il me faut de nouveau…
…descendre au niveau de la mer…
…pour remonter illico dans les hauteurs
Un reposant passage en balcon…
…quelques phases de montées/descente…
… et je déboule à Sidmouth
Final de choix, la station balnéaire huppée de Sidmouth est sans conteste la plus belle que j’ai traversé du séjour, avec ses grandes demeures aux façades blanches tassées sur le front de mer, ses rues commerçantes animées et ses pelouses impeccables, sur lesquels des bourgeois adéquatement vêtus s’adonnent à des jeux spécifiquement britanniques, tels le croquet, le boulingrin ou le tennis sur gazon. Avant d’embarquer pour Exeter, je fais ma toilette dans les eaux de la Manche, bien moins froides que je craignais en ce jour d’août ensoleillé. Fidèles à leur étrange coutume, les Anglais s’y baignent habillés ; je suis le seul à y pénétrer torse nu.
La station balnéaire de Sidmouth
Le front de mer
L’église de Saint Gilles et Saint Nicolas
Son clocher
La place centrale
La principale rue commerçante
Un gazon est consacré au tennis…
…un autre au croquet…
…et un troisième au boulingrin
Grisé par cette belle conclusion, je ne devine pas le final galère dans lequel je m’embarque en rejoignant l’aéroport d’Exeter. Il me faut négocier pour bivouaquer dans son hall central ; on me réveille à 5 heures du matin alors que mon avion embarque quatre heures plus tard ; il ne décollera finalement qu’à 11h, ce qui m’aurait fait rater mon train si ce dernier n’était pas parti avec un retard plus conséquent encore, suite à une alerte factice à la bombe. Au final, je n’atteindrai Rennes qu’en fin de soirée et devrai sans étape à mon domicile me rendre au travail, où je prendrai mon poste avec une heure de retard. Le voyage retour est décidément la plaie du randonneur itinérant.