Lutte hivernale dans la Sierra Nevada (décembre 2018) – 6/7 – autour du Pico del Trevenque

Les deux dernières étapes du trek me font graviter dans des paysages d’allure lunaire, autour de la montagne sablonneuse du Cerro del Trevenque. Bien que j’y évolue presque exclusivement sur des sentiers balisés, l’effort reste constant, tant du fait du revêtement et de l’escarpement du terrain que de la quantité de kilomètres à ingérer, plus de 60 en tout, sur un temps de jour toujours aussi restreint. Malgré tout, c’est un final assez reposant que je m’accorde, après des péripéties parfois indigestes en haute montagne.

En rouge, les deux derniers jours de marche

Pour profiter de chemins bien indiqués, je dois au préalable gagner hors sentier le col del Pino, la trace officielle étant perdue dans les hauteurs, sous une épaisse couche de neige ; une lutte de 4 kilomètres dans des chaos rocheux inclinés émaillés de buissons, avec pour récompense finale un panorama sur de multiples pics dont le plus saillant est l’immense dune pyramidale du Trevenque.

Perspectives sur un champ de bosse

Du col, vue sur le Cerro del Mirador, à droite, le Pico del Tesoro, à gauche, et entre les deux, la plaine lointaine de Grenade

Le Pico del Tesoro

A sa gauche, le Cerro del Trevenque…

…ici en gros plan

Des abords du Cerro del Trevenque, vue en arrière vers le Pico del Tesoro et la forêt traversée

J’escaladerai le Trevenque le lendemain ; pour l’heure, je file au sud du massif, par un tracé conçu comme le best-of de celui que j’aurais entrepris si je n’avais pu franchir la Sierra Nevada. Son premier tronçon fait le tour d’une montagne érodée, la Puntal de los Mecheras, par un sentier en balcon serpentant sur la paroi d’en face, qui me conduit naturellement en surplomb des gorges du Dílar.

Autour de la Puntal de los Mecheras

La montagne en question

Je franchis le ravin qui l’encercle…

…et file sur la paroi opposée

Du sentier en balcon, vue en arrière, vers la vallée longée…

…en avant, vers le col que je vise…

…et de côté, vers la Puntal de la Mecheras, derrière laquelle apparaît le Cerro del Trevenque

Du col, vue sur le canyon du Dílar…

…et le Cerro del Trevenque

Sur ses pentes, un œil aiguisé peut repérer, dans le lacet de la voie carrossable, le refuge de Rosales, dans lequel je compte passer la nuit

Je me serai directement rendu au refuge si mon rythme rapide ne m’avait pas octroyé assez de temps pour exécuter un ambitieux détour au cœur des gorges du Dílar. J’y descends par une sente louvoyant sur les pentes érodées du chaos calcaire de l’Alayos de Dílar ; s’en dégage une atmosphère lunaire dont je n’ai guère le temps de profiter.

Sur les contreforts de l’Alayos de Dílar

Passé un petit col…

…on transite par les hauteurs de la vallée de Juana Benítez…

…sur les pentes de l’Alayos de Dílar…

…dont certaines sont si érodées que le sentier s’est par endroit presque effondré

Au-delà d’un second col…

…dont l’approche est problématique, l’érosion rendant la chute envisageable…

…le sentier bascule temporairement dans une autre vallée…

…culminant au sommet de Rambla Seca

Au loin, le Cerro del Trevenque, et plus loin encore, des cimes enneigées qui ne me manquent pas

Deux petites heures d’une progression labyrinthique et la descente s’accentue enfin, sur un banc de sable qui poursuit sa chute jusqu’au pied du ruisseau du Dílar. Je n’ai plus qu’à le remonter sur cinq petits kilomètres, par des chemins que j’espère praticables ; il n’en sera rien ! La sente est souvent obstruée par la végétation, et du fait de l’étroitesse des gorges, transite sans cesse d’une rive à l’autre, sans qu’aucun gué ne facilite le passage. Pressé par la nuit tombante, je traverse plusieurs fois chaussures aux pieds le cours d’eau glacé, et suis bientôt mouillé jusqu’aux mollets.

Au creux des gorges du Dílar

Le banc de sable par lequel j’aborde les gorges

Le Dílar photographié lors d’une traversée ; à gauche, le « chemin » que je dois suivre, enfoui sous les hautes herbes

Les parois du canyon

Un étrange monticule pyramidal

Fatigué et trempé, je compte sur le refuge de Rosales pour me remonter le moral et m’apporter un peu de chaleur, après trois nuits en tente humides et glaciales. J’y arrive presque de nuit, plein d’un espoir légitime, en ce réveillon du jour de l’An ; malheur, il est fermé à double tour ! Je ravale mon dépit en engouffrant un paquet de gâteaux, puis m’installe près du mur, sur sa terrasse et sous la voûte étoilée, pour une nuit finalement pas mauvaise, l’air étant plus sec dans cette partie de la Sierra Nevada.

Le matin suivant est consacré aux Arenales del Trevenque, un massif  groupant d’immenses dunes calcaires striées de ravines, dont la plus proéminente est le Cerro del Trevenque.

Les Arenales del Trevenque

Vue d’ensemble

Le Cerro del Trevenque, sur lequel on se hisse par un raidillon sablonneux presque dangereux si on s’y risque sans bâtons

Le sentier de crête vu des abords du sommet

Il est par endroit profondément érodé

Le chaos rocheux entourant le sommet

Du sommet, vue sur les Arenales…

…l’Alayos de Dílar où j’ai erré la veille…

…et à l’horizon, la plaine de Grenade

Entre le Trevenque et Grenade se situe le dernier objectif du trek, les gorges de Monachil, distantes d’une douzaine de kilomètres que j’avale, pour la première fois depuis cinq jours, sur des chemins paisibles ne nécessitant aucun effort particulier.

Une transition douce

Des sentes tranquilles…

…passent au large des gorges de Dílar…

…puis de la vallée du Huenes

A l’horizon, dans toute son étendue, la ville de Grenade…

…et en contrebas, le village de Monachil, où j’espère conclure le trek

Non sans m’être coûteusement égaré sur ses contreforts, je dégringole en début d’après-midi dans le canyon de Monachil. En ce jour férié, les promeneurs s’y pressent. Le canyon en lui-même est un véritable ravin, si étroit que même le ruisseau peine à s’y frayer un chemin. On ne peut s’y infiltrer que par la grâce d’un rebord bétonné, intercalé entre le cours d’eau et la paroi sud, si escarpée qu’elle contraint parfois les marcheurs à s’y suspendre, à ramper dessous ou à transiter par telle pierre surgissant du ruisseau. Un peu plus loin, le canyon s’élargit ; on y évolue sur une série de ponts suspendus. Les enfants adorent, moi un peu moins.

Les gorges de Monachil

Un promontoire d’où les gorges se dévoilent

On ne peut accéder directement au fond de vallée ; il faut d’abord transiter par sa partie opposée

Le vallon vu de cette extrémité

Un bon spot de bivouac au creux du vallon

Le passage sur une voie bétonnée

Sur une courte séquence, elle s’infiltre carrément dans une grotte

Les adultes doivent parfois s’accrocher à des poignées incrustées dans la paroi

Un pont suspendu

Dès que possible, je m’extirpe de la gorge et me rends par la route à Monachil. Comme je le craignais en ce jour de l’An, aucun bus n’y circule. Il me faut poursuivre la route le long du Rio del Genital, puis des cinq kilomètres de banlieue qui s’étendent jusqu’au centre-ville de Grenade.

La vallée du Genital vue des premières maisons de la banlieue de Grenade

Cette conclusion n’est finalement pas déplaisante, en ce qu’elle ne brise pas la continuité de la marche : j’aurai visité les plus hauts lieux de la Sierra Nevada en partant de Grenade et en y revenant à pied, au fil d’un itinéraire de presque 200 kilomètres !