En 2019, mon premier baroud dans l’Apennin septentrional s’était soldé par un semi-échec, sur les pentes enneigées du mont Cimone. J’y reviens avec un esprit de revanche, même si mon frère et moi nous attaquons à un secteur bien plus occidental de la chaîne, le parc régional des Cent lacs, inclus dans celui, national, de l’Apennin tosco-émilien. Et si nous avons failli subir un second revers, la météo étant catastrophique l’après-midi de notre arrivée, l’expérience aura au finale été bien plus concluante.
Notre boucle dans le parc des Cent lacs (lien openrunner)
Nous nous garons en début d’après-midi près du refuge de Lagdei.
La cabane que nous visons est distante d’à peine 5 kilomètres et 400 mètres de dénivelé, mais nous mettrons deux bonnes heures à l’atteindre, Ivonig n’ayant pas récupéré d’un coup de chaleur subi la veille dans les Cinque Terre. Le puissant orage qui nous menace depuis le déjeuner n’explose qu’au moment où nous pénétrons dans l’abri. Timing idéal… si l’on n’avait pas oublié notre réchaud dans la voiture ! Épuisé, Ivonig se met au lit, pour une nuit de quinze heures, pendant que j’effectue un aller-retour vers le parking sous des trombes d’eau.
Le modeste abri
Arrivés au refuge sous la pluie, nous en repartons dans un brouillard tel que je soupçonne les Apennins de m’en vouloir personnellement. Fort heureusement, au moment où nous nous hissons sur l’arête que nous devons longer toute la journée, les brumes se tassent sur sa paroi sud ; le côté nord, le plus riche en panoramas, se dégage définitivement.
Sur la crête de l’Apennin
Les nuages se dispersent…
…et se tassent sur notre flanc droit…
…nous laissant libre de contempler l’autre…
…sauf quand nous passons en forêt
Régulièrement, de puissants contreforts rocheux surgissent des flancs de la crête que nous longeons et s’en vont perpendiculairement vers la plaine parmesane.
Saillies rocheuses des Apennins
La barre du mont Roccabiasca…
…celle du Rocca Pumacciolo…
…et celle du Rocca Pianaccia
De côté, elle prennent l’allure de pyramides minérales…
…qui ennoblissent les pentes herbeuses de la dorsale
Passée la barre rocheuse de Roca Pianiccia, nous comprenons la dénomination du parc des Cent lacs : la montagne s’aplanit, permettant la formation de nombreux plans d’eaux.
Les Cents lacs
En avant-goût, le Lagoni, par lequel nous reviendrons le lendemain
Les lacs Sillara
Les lacs Campione
Le lac Martini
Au niveau du lac Martini, nous quittons la crête pour le bivacco Capanna Cagnin, une cabane sommaire qui a le mérite de nous protéger des hordes de moustiques environnantes.
Vers le bivacco Capanna Cagnin
Ivonig repère l’abri dans une vallée…
…dominée par le mont Torricella
La cabane a été érigée en lisière de forêt, en hommage à un alpiniste défunt.
Elle est spacieuse mais spartiate
Il est encore tôt ; je laisse mon frère à ses lectures et m’en retourne sur la crête jusqu’à sa cime conclusive, le mont Bocco, en méditant sur la suite solitaire à donner à mes aventures.
Du mont Bocco, vue sur les prochains massif de l’Apenninn
Alors que je retourne à l’abri, deux formes mouvantes m’arrachent soudainement à mes pensées : ce sont deux jeunes loups, de la taille d’un berger allemand et distants de 100 bons mètres ! Ils avancent vers moi sans être conscients de ma présence, focalisés qu’ils sont sur une bergerie en contrebas. Je les observe quelques secondes, scié, quand ils me repèrent et se dispersent immédiatement. J’empoigne trop tardivement mon appareil photo ; le premier a disparu, et le second est si éloigné que mes clichés ne donnent rien.
La zone où j’ai repéré les deux loups
Le lendemain, nous revenons à notre voiture en longeant les lacs que nous dominions la veille.
Derniers kilomètres avec mon frère
Ivonig bataille avec les moustiques…
…dépasse les lacs Campione…
…puis les lacs Sillara…
…et au prix d’un détour sur une crête parfaitement dégagée…
…peut enfin apprécier les panoramas vers le sud et la Toscane
De retour sur le flanc nord…
…nous descendons la dorsale par la Bucca della Neve…
…longeons le Lagoni…
…sur une jolie voie pavée, puis sur la route, direction la voiture !
Pour mon frère, le retour en voiture à Rennes s’annonce très long. Malgré tout, en guise d’adieu, il insiste pour me déposer à Milan, à une heure de train de mon premier trek solitaire, sur les rives du lac de Côme.