[septième trek de l’Europe en 25 treks]
La traversée des Dolomites, plus long des 25 treks de mon tour d’Europe, aura également été le moins conforme aux plans établis avant le grand départ.
Initialement, j’entendais relier le plus directement possible, en une grosse semaine, deux des plus iconiques régions dolomitiques, le groupe du Catinaccio et le parc naturel des Tre Cime. L’annulation de l’étape autrichienne me permit de doubler le temps alloué aux Dolomites. Je décidai donc de partir, non pas de la ville de Bolzano, proche du Catinaccio, mais plus au sud, de celle de Trente, voisine du lac de Garde, où je venais d’achever un petit trek improvisé.
Le bassin urbain de Trente est séparé des montagnes dolomitiques par une chaîne qui me semblait prometteuse, celle du Lagorai. Je me proposai d’y effectuer une marche d’approche de quelques jours, avec le groupe du Catinaccio dans le viseur. Si j’avais alors disposé des connaissances acquises depuis, j’aurais agi autrement, en partant de la – certes moins accessible – ville de Belluno, pour rejoindre le groupe du Catinaccio par celui des Pale, que j’ai pu me conteter de contempler à distance.
Une fois lancé, suite à des rencontres fructueuses avec les randonneurs locaux, j’ai constamment modifié ma trajectoire, dans un but unique : explorer un maximum de massifs dolomitiques, par les meilleures voies possibles. Ce peaufinage constant a accouché d’une séquence de haut niveau entre le sixième jour, moment où j’atteins le Latemar, et le dix-septième, qui marque la sortie du parc naturel des Tre Cime et l’arrivée en Autriche.
La traversée des Dolomites (lien openrunner)
Sans surprise, je classe les Dolomites très haut dans ma hiérarchie personnelle ; les récits et photos à suivre suffiront à montrer pourquoi. Pour avoir arpenté bien d’autres montagnes européennes, je n’en vois pas beaucoup d’aussi stupéfiantes. Chaque massif à une conformation particulière, et dans les meilleurs d’entre eux, on enchaîne les panoramas surréalistes, sur des chemins audacieux, improbables, mais rarement dangereux. Et malgré leur élévation certaine, les Dolomites ont un avantage non négligeable : leurs sentiers souffrent moins de l’enneigement tardif que ceux des montagnes alpines classiques, du fait de leur configuration, de leur revêtement rocailleux, de leurs aménagements nombreux et de l’affluence touristique. Dès la fin juin, les voies hautes sont soit déneigées, soit nettement tracées dans la poudreuse, et on peut presque se balader partout.
Nonobstant leur beauté, j’adresserai deux reproches aux Dolomites. Le premier, c’est l’étroitesse et l’isolement de ses groupes montagneux. On doit fréquemment transiter de l’un à l’autre, par des vallées encaissées, au prix d’efforts ingrats qui ont fait grimper le dénivelé du trek : 1500 mètres quotidien, positif comme négatif, pour à peine 20 kilomètres de moyenne journalière. Le tout à bonne vitesse, la menace de l’orage étant souvent mise à exécution au cours de l’après midi.
Mais le défaut essentiel des Dolomites, c’est son tourisme galopant, que la crise sanitaire n’a pas réduit, les visiteurs venant principalement des pays voisins, l”Italie, l’Autriche et l’Allemagne. Les vallées sont très construites et les massifs emblématiques bondés, surtout le week-end. Les abris libres y ont depuis longtemps disparu et le camping sauvage y a été interdit, au profit des refuges gardés, très nombreux et coûteux. Me refusant depuis des années à dormir dans ces derniers, j’ai quelque peu galéré. Si j’ai pu, durant la marche d’approche, passer cinq nuits dans des cabanes parfois superbes, une fois au cœur des Dolomites, j’ai du camper discrètement, sauf sur la cime secondaire de Lana, et n’ai pas retrouvé mes chers abris avant les derniers jours, dans des montagnes redevenues plus banales et dépeuplées. C’est le prix à payer pour arpenter ces montagnes uniques !
Mes 18 nuits dans les Dolomites
Parti un lundi après-midi de Pergine, petite ville de la banlieue de Trente, je n’attaquerai le premier massif proprement dolomitique que cinq jours plus tard. Sur ma route, une attraction préalable : le Translagorai, un itinéraire qui suit au plus près la ligne de crête de la chaîne de Lagorai. Je le rallierai en matinée, au niveau du mont Fravort, au terme d’une longue grimpe en deux temps, coupée d’une nuit dans le préau d’un refuge privé.
Vers le Translagorai
La haute vallée de Valsugana
Une soirée de marche sur voie pavée…
…une matinée sur des petits chemins…
…et j’apprivoise le mont Fravort…
…qui est truffé de constructions abandonnées remontant aux guerres mondiales
C’est au mont Gronlait que les choses sérieuses commencent. A moi les Dolomites !