Version longue de la Laugavegur (juillet 2020) – 1/5 – présentation et traversée de l’Eyjafjöll

[neuvième trek de l’Europe en 25 treks]

Après avoir remplacé en catastrophe des billets d’avions annulés à deux semaines du départ et avoir évité, à l’aéroport de Keflavik, un test positif au covid dont les conséquences auraient été désastreuses , j’arrache une grosse semaine de liberté pour profiter des contrées sauvages de l’Islande.

Les deux voies les plus courantes d’exploration de l’Islande sont en même temps les plus opposées. D’un côté, la traversée nord-sud, voire est-ouest de l’île, hors-sentier et en totale autonomie, l’un des challenges européens les plus corsés ; de l’autre, bien plus facile, la Laugavegur, seule randonnée au long cours balisée, avec ses 75 kilomètres reliant la vallée de Þorsmork au Landmannalaugar, le site naturel le plus visité de l’île.

Faute de temps et de goût de l’extrême, je me rabats sur la Laugavegur, non sans en durcir le tracé. D’un côté, je double son kilométrage en implémentant quelques détours et en ajoutant un prologue (la classique étape Skógar – Þorsmork) et un épilogue entre le Landmannalaugar et Rjúpnavellir. De l’autre, je décide de marcher dans le sens non conventionnel, du sud au nord, donc de la mer vers les Hautes terres, ce qui rajoute du dénivelé mais permet d’avoir tout du long le soleil dans le dos.

Le tracé suivi, la Laugavegur proprement dite étant la partie comprise entre la nuit 1 et la nuit 3 (lien openrunner)

Je pensais consacrer au moins six jours aux 150 kilomètres du parcours. Au final, ils n’auront occupés que quatre journées et demie de marche, à un rythme intensif lié à la fois à la menace de pluies imminentes, à mes jambes de feu et à la facilité relative de la progression.

Il faut dire qu’on est loin du périple sauvage et solitaire que viennent chercher en Islande les randonneurs européens les plus audacieux. Le sentier est net, bien aménagé, le dénivelé faible, le revêtement correct ; les franchissements de rivière se comptent sur les doigts d’une main ; tous les quinze kilomètres, un camping permet de se ravitailler en eau ; celui du Landmannalaugar, accessible en voiture, dispose même de douches chaudes et d’une épicerie mobile ; et même si la crise sanitaire à fait s’effondrer l’affluence, on croise beaucoup de marcheurs, surtout quand on emprunte l’itinéraire en sens inverse.

Ce qu’offre la Laugavegur, ce n’est pas un odyssée périlleux, mais la découverte paisible des Hautes terres du sud de l’Islande et des trésors qu’elles recèlent : des glaciers hostiles, des déserts de laves, des gorges émaillées de cascades, fumerolles acides et autres sources chaudes, et surtout des dunes volcaniques lunaires tantôt noirâtres, tantôt colorées voire fluorescentes, tantôt zébrées de névés ; des paysages sans pareils en Europe, la section dans le massif du Torfajökull étant incroyablement photogénique.

J’entame l’expérience en bord d’océan, au camping de Skógar, qu’un bus relie chaque jour à Reykjavik.

Le camping de Skógar

J’y enclenche une longue journée de marche à travers l’Eyjafjöll, massif glaciaire abritant un volcan célèbre pour avoir, lors de sa dernière éruption, en 2010, perturbé tout le trafic aérien européen.

En rouge, ma journée de marche dans l’Eyjafjöll

Les dix premiers kilomètres, je remonte tranquillement le ruisseau de la Skógá, dans des paysages de plus en plus neigeux et minéraux.

Le long de la Skógá

Par endroit, ses rives sont si encaissées qu’elles s’apparentent à de petites gorges.

Les gorges de la Skógá

Qui dit gorges dit cascades, et la Skógá en compte une douzaine de notables.

Quelques cascades de la Skógá

La première et plus célèbre cascade, la Skógafoss, haute de 60 mètres et large de 25

L’Hestavaðsfoss

La Steinbogafoss

L’Innri-Fellsfoss

La Rollutorfufoss

La Skálabrekkufoss

La Kroksfoss

La Miðfoss

L’Efstifoss

La Slæðufoss

Au-delà de la Slæðufoss, je m’avance dans un désert de lave et de neige qui se dresse vers le Fimmvörðuháls, le « col des cinq cairns ». Cette étroite voie de passage entre les glaciers d’Eyjafjallajökull et de Mýrdalsjökull connecte la vallée de la Skógá à celles du Hvannà et du Hrunar, dont le dévoilement est le premier moment de grâce du parcours.

Du haut du Fimmvörðuháls

Je quitte la vallée de la Skógá…

…pour les hauteurs glacées du Fimmvörðuháls

Une traversée express de ses bosses enneigées…

…avec vue à l’est sur le glacier de Mýrdalsjökull…

…et j’atteins deux cônes volcaniques créés lors de l’éruption de 2010, celui de Magni…

…puis celui de Móði

Du haut de Móði, j’aperçois au loin le glacier de Tindfjallajökull…

…et au premier plan…

…la vallée de Hvannà…

…et plus à droite, celle, irréelle, de Hrunar

Si la vallée de Hrunar est plus fascinante, c’est dans celle de Hvannà que je m’engouffre.

Dans la vallée de Hvannà

Par une sente tortueuse…

…je m’éloigne des cimes…

…et m’immisce dans un vallon…

…dont les flancs, d’abord lâches…

…se creusent progressivement…

…jusqu’à dessiner une véritable gorge

C’est ainsi que je rallie la vallée de Þórsmörk, site d’arrivée classique de la Laugavegur.

Þórsmörk

Þórsmörk est un petit massif s’étendant d’ouest en est…

…vers la pyramide modeste du Tindfjöll

Au pied du massif…

…la haute vallée de la Krossá…

…où conduit l’agréable sentier

Aiguillé par l’avis de randonneurs suédois, je snobe le camping officiel de Þórsmörk pour un bivouac plus lointain, dans un bosquet bordant la rivière de la Ljósá, au milieu des étendues grises de la Laugavegur.